En juillet dernier, SFR annonçait tambour battant son intention de déployer son propre réseau FTTH, sur fonds propres. Le voici qui revient aujourd’hui sur ce projet, ne souhaitant pas trop s'engager envers les collectivités territoriales. Et manquant accessoirement des capacités d’investissements nécessaires.
C’est un « changement de doctrine » que Régis Turrini a annoncé hier. Entendre un rétropédalage en règle de SFR sur son projet de fibrer 80 % du territoire à l’horizon 2022 sur fonds propres. Le secrétaire général de SFR s’exprimait à l’occasion de la conférence annuelle du Graco (Groupe d'échange entre l’Arcep, les collectivités territoriales et les opérateurs) sur la couverture numérique. « Ce projet, qui a peut-être été présenté maladroitement, n’a pas rencontré l’accueil escompté » explique-t-il, provoquant les rires du public.
Il faut dire qu’en juillet dernier, l’annonce par Michel Paulin, alors DG de SFR, avait créé la surprise. L’opérateur s’était alors engagé à fibrer 100% du territoire d’ici à 2025 sans avoir recours aux subventions publiques ni aux Réseaux d’Initiative Publique (RIP). De fait SFR, soucieux d’être propriétaire de ses actifs réseaux et non locataire, aurait détenu un réseau à l’échelle nationale. Et Michel Paulin parlait bien de FTTH (fibre jusqu’à l’habitant).
Certes, pareils investissements pèseraient lourds sur les comptes du groupe, déjà fortement endetté. Mais « être propriétaire de son réseau, c'est notre business model, c'est aussi une garantie de retour sur investissement à long terme » répondait le futur ex-directeur général. Des opérateurs tiers pourraient exploiter ledit réseau, rémunérant SFR au passage. A l’instar de ce que fait Orange, bête noire de la filiale d’Altice.
La volonté est là, pas l’argent
Six mois plus tard, SFR abandonne l’idée. « Force est de constater que nous n'avons pas su créer les conditions nécessaires pour remporter l'adhésion du plus grand nombre, et surtout des collectivités locales, et que au contraire c’est une démarche qui risquait de se retourner contre nous » souligne Régis Turrini devant le parterre d’élus. Notons que les dirigeants impulsant ce projet, Michel Paulin et Michel Combes, ont tous deux quitté SFR. Outre les réserves du gouvernement, de l’Arcep, des élus et des autres opérateurs, la situation financière délicate d’Altice explique pour beaucoup ce revirement. Malmené en bourse, le groupe voit ses capacités d’investissements drastiquement réduites.
« L’actualité récente de notre groupe nous conduit à concentrer nos efforts sur l’amélioration de la qualité de nos offres et sur l’amélioration de nos relations avec les collectivités locales ». La place (et l’argent) manque pour un réseau FTTH déployé sur fonds propres : circulez, il n’y a plus rien à voir. L’opérateur continuera néanmoins de tenir ses engagements en termes de déploiement. D’autant qu’il a attaqué Orange en justice sur le contrat signé entre les deux opérateurs en 2011 : SFR exige un repartage des déploiements fibres, estimant qu’il achèvera à brève échéance de fibrer les foyers qui lui ont été attribués.