Revoilà Mounir Mahjoubi conforté dans sa mission de grand patron du numérique au gouvernement. Et quoique passé de Matignon à Bercy, il a emmené dans ses valises rien de moins que la DINSIC, en profitant pour remplacer Henri Verdier par Nadi Bou Hanna, un ancien haut-fonctionnaire devenu entrepreneur.
A gauche Nadi Bou Hanna, à droite Côme Berbain
Le déplacement de Mounir Mahjoubi à Bercy, secrétaire d’État rattaché au ministère de l’Économie et à celui des Comptes Publics, avait pu surprendre, d’autant que le « numérique » disparaissait de ses attributions à l’occasion de ce remaniement. Plus tard, le principal intéressé parlera d’un « bug ». Et pour cause ! Il perdait la main sur le numérique de l’État.
En effet, la DINSIC est placée depuis un décret de novembre 2017 « par délégation du Premier ministre, sous l'autorité du ministre chargé du numérique ». En l’occurrence le secrétaire d’État au Numérique sous la tutelle de Matignon, un certain Mahjoubi Mounir. Une fois celui-ci à Bercy se pose donc la question suivante : qui donc a autorité sur la direction interministérielle du numérique et du système d'information et de communication de l'État ?
Matignon ou Bercy ?
Il a donc été nécessaire de modifier les attributions des deux ministères, de telle sorte qu’à l’Économie, Bruno Le Maire traite du numérique et « élabore le cadre juridique relatif au numérique, aux technologies d'avenir et aux plateformes, à l'échelle nationale, européenne et internationale ». Il dispose également dans le cadre de sa mission de « la direction interministérielle du numérique et du système d'information et de communication de l'État ».
Tout comme Gérald Darmanin à l’Action et aux Comptes Publics, qui non seulement dispose de la DINSIC, mais aussi de la direction interministérielle de la transformation publique et de l’administrateur général des données. En d’autres termes, la partie du numérique jusqu'alors directement pilotée de Matignon suit Mounir Mahjoubi à Bercy. Celui-ci a également eu droit à son décret relatif à ses attributions. On notera notamment qu’il « prépare et coordonne, pour le compte du ministre de l'action et des comptes publics, la politique de transformation numérique de l'État » et « traite les questions relatives au système d'information de l'État ».
Loin des yeux, loin du coeur
Ni une ni deux, une fois le cadre fixé, le secrétaire d’État de nouveau chargé du numérique s’attaque au remaniement de la DINSIC. Avant le remaniement gouvernemental, on savait de source sûre que la DSI de l’Etat était dans le viseur de Mounir Mahjoubi, et surtout son patron, Henri Verdier, avec lequel le secrétaire d’État entretenait vraisemblablement des relations tendues. Pour ses bons et loyaux services, Henri Verdier se voit donc remercié et confié le poste d’ambassadeur pour le numérique.
Sa prise de fonctions aura lieu le 15 novembre. Il y remplace David Martinon, qui part pour l’ambassade de France en Afghanistan. Le rôle d’ambassadeur du numérique, sous l’autorité du Quai d’Orsay, consiste à participer aux négociations internationales sur la gouvernance d’Internet, la cybersécurité, « la lutte contre l’utilisation d’internet à des fins terroristes », la liberté d’expression, la propriété intellectuelle…
Y a-t-il un pilote dans la DINSIC ?
Pour remplacer Henri Verdier à la tête de la DINSIC, « sur proposition du ministre de l’action et des comptes public », Nadi Bou Hanna a été nommé directeur interministériel du numérique et du système d'information et de communication de l'État. Il prendra quant à lui ses fonctions le 10 décembre prochain. De ce fait personne ne sera aux commandes de la DINSIC pendant près d’un mois. Nous attendons de plus amples informations sur cette période de transition.
Nadi Bou Hanna présente un profil intéressant. Passé par la Direction générale des Douanes, puis la direction des systèmes d’information du ministère des Affaires étrangères, ce haut fonctionnaire est également un entrepreneur, fondateur et dirigeant de trois entreprises, Adminext, 6Tzen et Workibox, toutes trois spécialisées dans la transformation numérique et les tâches administratives.
Et pour accompagner le nouveau chef d’orchestre du numérique de l’État, le gouvernement a nommé au poste de directeur des technologies numériques de l'État (soit le CTO de l’Etat) Côme Berbain. Ce titulaire d’un doctorat en informatique est un ancien d’Orange où il était ingénieur sécurité, avant de passer par le ministère de la Défense et par l’ANSSI. Il fut également, à partir de 2017, conseiller à la transformation numérique au sein du cabinet du secrétaire d’État au numérique, un certain Mounir Mahjoubi.