IBM s’empare de Red Hat

Pour 34 milliards de dollars Big Blue réalise la plus grosse acquisition de son histoire. Virage stratégique ou retour aux sources des années 2000 lorsque IBM se voulait le chantre du "libre" ?

Pendant deux décennies au moins Red Hat aura été le porte-étendard de l’open source commercial. Un pionnier de l’adaptation des distributions Linux aux besoins des serveurs et des entreprises (Red Hat Enterprise Linux) avec la maintenance et les services qui allaient avec. Le support des principaux acteurs de l’informatique IBM, Oracle, Microsoft lui a été acquis progressivement, Red Hat devenant peu à peu un partenaire incontournable.

Aussi l’annonce dimanche par IBM de son intention d’acquérir Red Hat pour 34 milliards de dollars n’est pas surprenante en soi. Si ce n’est son montant colossal rarement dépassé dans la high tech (Dell-EMC en 2016). IBM achète en effet la totalité des actions Red Hat en circulation 60% plus cher que la dernière cotation de vendredi. Serait-ce pour décourager toute surenchère de la concurrence ? La dernière opération majeure touchant la communauté open source est toute récente (elle vient d’ailleurs de se conclure). Elle concernait GitHub racheté en juin par Microsoft pour seulement… 7,5 milliards de dollars. Lequel Microsoft s’est récemment rapproché de Red Hat pour porter OpenShift sur Azure et Azure Stack.

131 années de bénéfices !

Red Hat mise tout sur le Cloud hybride. Hervé Lemaitre, CTO de Red Hat France, nous confiait récemment (lire L’Informaticien n°168) que « les clients veulent s’émanciper des infrastructures qui sont devenues immatérielles, ils sont donc dans une approche applicative indépendante ». Et le futur du Cloud pour Red Hat se décline clairement autour des conteneurs et OpenShift à travers l’implémentation de Kubernetes qui en est le chef d’orchestre. Une offre qui a évolué à travers le rachat par Red Hat en début d’année de CoreOS, spécialiste des conteneurs. 

Red Hat connaît une croissance annuelle de son chiffre d’affaires d’environ 20% mais ne génère que 259 millions de dollars de bénéfice pour un CA de 2,92 milliards (exercice fiscal terminé fin février 2018). A 34 milliards, Red Hat est valorisé 131 fois ses bénéfices ! C'est peu dire qu'IBM ne cherche pas les profits immédiats dans cette opération.

Le rachat par IBM annoncé hier ne devrait être totalement finalisé que fin 2019. Red Hat sera intégré à la division Cloud hybride d’IBM. Et Jim Whitehurst, CEO de Red Hat, rejoint le comité exécutif auprès de Ginni Rometty, CEO d’IBM.