Est-ce la fin de Linux, de sa communauté, de l’open source ? C’est ce que semble croire un certain nombre de personnes sur Reddit et Twitter après que la direction du projet Linux ait mis en place une code de conduite. Assurément, un environnement respectueux et inclusif signifierait la mort du kernel !
Dans le sillage du retrait temporaire de Linus Torvalds, la direction du projet a décidé de mettre en place un « code de conduite » à destination de ses contributeurs, afin de promouvoir un environnement qui soit au moins un peu moins toxique. S’il existait bien un Code of Conflict, Greg Kroah-Hartman estime que celui-ci a échoué à apaiser les relations entre développeurs. « Le Code de conflit n'atteint pas son objectif implicite de promotion de la civilité et l'esprit "soyons bienveillants les uns envers les autres" » » écrit-il en préambule.
Décision a donc été prise de le remplacer par un « Code of Conduct » beaucoup plus explicite quant aux conduites à tenir (et surtout ne pas tenir). « Dans le but de favoriser un environnement ouvert et accueillant, nous, en tant que contributeurs et mainteneurs, nous engageons à faire de la participation à notre projet et de notre communauté une expérience sans harcèlement pour tous, indépendamment de l’âge, de la corpulence, de l’ethnicité, des handicaps, des caractéristiques sexuelles, du genre, du niveau d'expérience, de l'éducation, du statut socio-économique, de la nationalité, l'apparence personnelle, de la race, de la religion ou de l'identité et l’orientation sexuelles » commence cette nouvelle charte.
Un environnement respectueux et accueillant
Après ce préambule, le texte cite quelques exemples de bonne ou de mauvaise conduite. « Être respectueux des différents points de vue et expériences » : bien. « Harcèlement public ou privé » : mal. « Le Trolling, les commentaires insultants/désobligeants et les attaques personnelles ou politiques » : mal. « Faire preuve d'empathie envers les autres membres de la communauté » : bien. Le code de conduite prévoit également que des sanctions puissent être prises à l’encontre des contrevenants.
En soi, ce « Code of Conduct » n’est pas incroyablement révolutionnaire. En outre, il reprend le Contributor Covenant, une autre charte éthique utilisée dans d’autres projets open source, tel que Eclipse, Kubernetes, Mozilla Webmaker ou encore AngularJS. Et c’est là que les « problèmes » commencent. Le Contributor Covenant est l’œuvre de Coraline Ada Ehmke, une développeuse en faveur de l’open source ainsi que de la diversité et de l’inclusivité dans les communautés de développeurs et de développeuses.
Don’t be assholes
Il n’en fallait pas plus pour que s’indignent sur Reddit ou encore Twitter ceux qui voient la mise en place de ce code de conduite par Linux d’un mauvais œil. C’est le même son de cloche : ce Code of Conduct est le fait de SJW* qui veulent prendre le contrôle du kernel/diriger des chasses aux sorcières contre les pauvres développeurs qui ne sont pas d’accord. Coraline Ada Ehmke semble d’ailleurs être le diable en personne et Linux risque de ne pas se relever d’un pareil coup… « Donc finalement, la foule de SJW a forcé sa politique dans Linux Kernel Development. De mon point de vue, cela ne pourrait pas être une attaque plus sérieuse contre la communauté open source telle que nous la connaissons aujourd'hui » écrit un Redditeur.
Pensez donc ! c’est l’open source même qui est menacé par la promotion de la diversité et de l’inclusivité. Il suffit de constater l’échec cuisant de Kubernetes ou d’Angular, qui appliquent le Contributor Covenant, pour s’en rendre compte… Non ? Il est vrai qu’une charte pouvant être résumée par « Ne vous conduisez pas comme des cons » a de quoi choquer.
Sur la liste de diffusion du kernel toutefois, pas de tempête ni de débats enflammés sur ce Code of Conduct. On peut espérer que ce déchaînement n’est donc pas le fait d’une majorité de membres de la communauté, mais de trolls qui y sont en grande partie extérieurs. « Nous devrions respecter ces règles afin de faire de la communauté du noyau un environnement accueillant » écrit Greg Kroah-Hartman. Il aurait pu ajouter à l'adresse de ceux de la communauté qui sont opposés à ce code : « Si Linus est capable d'introspection, pourquoi pas vous ? »
* Social Justice Warriors, un terme dépréciatif utilisé pour qualifier des personnes défendant l’égalité des genres, l’anti-racisme, etc.