La réponse graduée suite au piratage en P2P n'était qu'une étape. La ministre de la Culture veut que la Hadopi lutte plus efficacement contre la réapparition rapide de sites miroirs, les flux de streaming ou les liens de téléchargement illégaux.
Il se trame quelque chose sur le devenir de la Hadopi, Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet. Dans une réponse à une question d'une députée, le ministère de la Culture indique piloter actuellement un groupe de travail interministériel qui planche sur de nouvelles mesures anti-piratage.
« La transformation rapide des usages conduit à s'interroger sur la pertinence d'un mécanisme de réponse graduée qui cible uniquement les échanges de pair-à-pair et ignore les autres formes de piratage telles que la lecture en flux (streaming) ou le téléchargement direct. Les actions judiciaires visant à faire fermer ou à bloquer l'accès aux sites pirates impliquent des procédures longues et coûteuses, dont l'efficacité est limitée par la réapparition rapide de « sites-miroirs ». Les initiatives reposant sur le droit souple portent leurs fruits mais sont, par construction, subordonnées à la volonté de coopération des acteurs concernés. »
Technologie de reconnaissance des contenus
La ministre de la Culture Françoise Nyssen prépare donc une stratégie globale de lutte contre la contrefaçon sur Internet.
« Les mesures, qui seront proposées dans les prochains mois, devront permettre de renforcer les conditions de protection de l'ensemble des catégories d'auteurs en cas d'atteintes à leurs droits sur Internet. Parmi les pistes de réflexion envisagées figurent la promotion et l'encadrement des technologies de reconnaissance des contenus, qui permettent de comparer automatiquement l'empreinte d'une œuvre avec celle des contenus mis en ligne par les internautes, et d'éviter ainsi l'apparition ou la réapparition de contenus contrefaisants sur les plateformes qui hébergent des œuvres.
« À cet égard, les mesures proposées devront permettre de répondre aux difficultés que certains titulaires de droits, dont les auteurs autonomes ou indépendants, peuvent rencontrer dans l'accès à ces outils techniques. Par ailleurs, des mesures plus contraignantes à l'égard des sites de streaming illégaux sont envisagées (constitution d'une « liste noire » par la HADOPI, possibilité d'agir rapidement contre les sites dits « miroirs », qui font renaître des sites pirates qui ont fait l'objet d'une action en cessation).
Les auteurs indépendants pourront saisir la Haute autorité
« S'agissant de la réponse graduée, les réflexions en cours portent sur les moyens d'en améliorer la pertinence et l'efficacité, s'agissant de la pratique du pair-à-pair, à laquelle elle s'applique. L'octroi aux auteurs indépendants de la possibilité de saisir la HADOPI pour demander la mise en œuvre de la procédure de réponse graduée à leur égard, en s'appuyant sur un constat d'huissier, figure parmi les améliorations envisageables. »
La question écrite qui a suscité cette mise au point émane de Brigitte Kuster, députée (LR) de Paris, membre de la commission des Affaires culturelles et de l'éducation.
2000 emplois détruits
Cette question reprend une partie des conclusions d'une étude du cabinet EY de février 2017 qui « montre qu'en moyenne 13 millions d'utilisateurs consomment illégalement 2,5 milliards de contenus culturels. 1,35 milliards d'euros : c'est le manque à gagner astronomique que le piratage de contenus audiovisuels coûte chaque année à l'État, à l'industrie de la filière et aux ayant-droits. Le coût de cette fraude généralisée pour la société est considérable : 2 000 emplois détruits, 430 millions d'euros de recettes fiscales et sociales perdues pour l'État et 330 millions d'euros d'investissement dans la création en moins. »
Question écrite 7656 et réponse parues au JO du 04/09. Des commentaires peuvent être apportés à la question écrite sur cette page de nosdeputes.fr (RegardsCitoyens.org).