Ne pensez plus Akamai comme un simple CDN, mais comme un acteur de la cybersécurité à part entière. Voilà le message martelé par la direction de l’entreprise américaine lors de son événement Edge Forum.
Akamai a réuni 350 de ses partenaires et clients à Barcelone, à l’occasion de son Edge Forum. Comme le nom de la conférence le laissait présager, le terme Edge est revenu un nombre incalculable de fois. Car Akamai est « at the edge », en bout de réseau, au dernier kilomètre, ce qui lui donne une position idéale pour protéger non seulement les applis, les sites web et les datacentres, mais surtout l’entreprise au sens large. Ainsi Akamai se présente volontiers plus comme une entreprise de cybersécurité à part entière que comme un régulateur du trafic sur Internet. Alors que la société fête cette année ses vingt ans, elle s’interroge sur comment préparer les vingt prochaines années, à une époque où la sécurité est devenue une problématique centrale. « On a commencé à travailler sur la sécurité au début des années 2010. Quand on est arrivé sur ce marché, personne ne nous voyait là-dedans. Akamai, c’était du content delivery network », raconte Henri d’Oriola.
Si l’entreprise jouissait effectivement d’un positionnement qui lui permettait de s’imposer comme un acteur de la cybersécurité, en ce qu’elle est fréquemment en première ligne contre des attaques DDoS, il lui a été difficile de se faire reconnaître comme tel. Aujourd’hui encore, on associe plus Akamai au content delivery network qu’à la protection des applications et des réseaux.
Point de passage
Pourtant l’entreprise américaine se fait un nom dans le secteur. Selon le vice-président en charge de l’Europe du Sud, l’un des meilleurs indicateurs de cette progression aura été la fréquentation de son stand lors des Assises de la sécurité à Monaco. « La première année, il n’y avait personne sur le stand », se souvient-il. « On a eu une croissance exponentielle de la fréquentation. Maintenant, les Assises sont un de nos événemements les plus importants. » Autre indice, la sécurité est l’activité qui connait la plus forte croissance chez Akamai. En France, l’entreprise peut se targuer d’avoir attirer des grands comptes, à commencer par LVMH, qui utilise la quasi-totalité du portfolio de l’Américain. On y trouve la BNP pour la sécurisation de ses applications et de ses datacentres, Schneider, Airbus, Darty…
« Historiquement, nous avons beaucoup travaillé avec les commerçants en ligne à l’époque où on se bornait à faire du CDN. Mais depuis le panel s’est très largement élargi à mesure qu’on attaquait de nouveaux domaines comme la sécurité », précise Henri d’Oriola. « Cela nous a permis d’adresser des verticaux dans lesquels nous étions assez peu présents, la banque ou encore l’industrie. Ces domaines n’avaient pas les mêmes contraintes de trafic et de fréquentation des sites que l’e-commerce et notre offre à l’époque ne correspondait pas forcément au besoin qu’ils avaient. » Se lançant dans la sécurité, Akamai a commencé à travailler sur la protection des applications et des datacenters, avant de se diversifier : reconnaissance des bots malveillants avec Bot Manager, protection de l’utilisateur contre les domaines et IP vérolés avec Enterprise Threat Protector ou encore Enterprise Application Access, une solution d’accès aux applications d’entreprise. Cette dernière est au cœur de l’approche Zero Trust mise en avant par Akamai.
Aucune confiance
Ce concept est résumé très simplement par Robert Blumofe, vice-président exécutif chargé des plates-formes et general manager de la branche Entreprise chez Akamai : « Ne faites confiance à personne, vérifiez tout, contrôlez constamment. » Paranoïaque ? Peut-être, mais à l’heure où les attaques gagnent en ampleur et en nombre, le spécialiste des serveurs de cache y voient une nécessité. « Vous ne pouvez pas vous attendre à ce que le périmètre maintienne les mauvaises choses en dehors de l’entreprise. Le périmètre en entreprise est une notion désuète : les collaborateurs travaillent à distance, les applications sont dans le Cloud… », ajoute-t-il. C’est alors que EAA entre en scène. Concrètement, cet outil permet à un utilisateur d’accéder à une application sur le réseau de l’entreprise, notamment lorsqu’il est à l’extérieur. Là où un VPN est généralement utilisé, Akamai pointe le danger de cette méthode, prenant le cas d’un utilisateur « infecté par un malware, qui va accéder tout de même au réseau de l’entreprise via un VPN, permettant au programme malveillant de jeter un œil au réseau et applications de l’entreprise. » Sur scène, les ingénieurs en font la démonstration au moyen d’une extension de navigateur vérolée qui va scanner le réseau de l’entreprise afin d’en découvrir les failles.
Enterprise Application Access requiert pour sa part que l’utilisateur s’identifie avec Akamai Platform et l’Active Directory de l’entreprise. Une fois authentifié, la solution associe la session TLS de l’utilisateur avec les connecteurs Enterprise Connector pour fournir à travers la plate-forme Akamai un accès uniquement aux applications autorisées sur le réseau d’entreprise et à rien d’autre. Notons que, ce faisant, l’application n’est pas visible sur Internet. Lors de la démo, Tom Leighton, le CEO d’Akamai, prend la métaphore d’un château fort. Avec un VPN, une fois le pont-levis franchi, l’utilisateur a accès à l’ensemble de la forteresse, soit au réseau de l’entreprise.
EAA, pour sa part, lui donne ce qu’il a requis – et ce à quoi les règles de sécurité lui donnent accès – sans le laisser entrer dans le château. Robert Blumofe insiste sur scène sur l’absence, dans l’approche zero trust, de notions d’intérieur et d’extérieur. Et en profite pour souligner l’imbrication de ses différentes solutions pour fournir une approche holistique au zero trust, un cadre de sécurité qui fournit uniquement des applications et des données aux utilisateurs authentifiés et autorisés, permet l’inspection en ligne et la journalisation du trafic, identifie et bloque le trafic venant de bots et protège les sites et applications contre les logiciels malveillants. Henri d’Oriola prend une autre image : « Nous jouons un rôle de firewall : Akamai peut se situer comme le point de passage obligatoire de ce qui rentre et sort de chez le client. »
Profitant de sa position aux « extrémités » des réseaux et de son offre de sécurité, l’entreprise veut s’imposer sur ce marché, sans toutefois prétendre jouer sur le même terrain que les acteurs historiques, à l’instar d’un McAfee ou d’un Kaspersky. En France, Akamai est partenaire d’Orange et en particulier d’Orange CyberDéfense, une association lui permettant de se placer sur des appels d’offres auxquels il ne pourrait répondre seul.