Quatre mois après avoir ouvert une enquête et communiqué ses griefs à Broadcom, soupçonné de pratiques anticoncurrentielles et d’abus de position dominante, la Commission européenne hausse le ton. Elle vient d’ordonner au géant des puces de cesser d’imposer certaines clauses à ses clients, à savoir les exigences d’exclusivité.
En juin dernier, la Commission européenne se penchait sur le cas Broadcom. Le géant était suspecté de restreindre la concurrence sur les marchés des puces destinées aux décodeurs de télévision et aux modems, secteurs dans lesquels il jouit d’une position dominante. Des pratiques anticoncurrentielles donc, reposant sur des clauses d’exclusivité dans les contrats avec ses principaux clients, ainsi que des rabais et autres avantages commerciaux, toujours sous condition d’exclusivité.
Bruxelles pointait également un petit problème d’interopérabilité entre les produits Broadcom et ceux des concurrents, conséquence possible d’une dégradation volontaire et d’abus de droits de propriété intellectuelle. Une enquête formelle avait donc été ouverte et les griefs officiellement communiqués à l'entreprise, la Commission y précisant que des mesures provisoires pourrait être prises avant la fin des investigations.
Et, chose rare, Bruxelles a annoncé cette semaine avoir pris des mesures provisoires afin de faire cesser les abus de Broadcom. « Si nous n'intervenons pas, le comportement de Broadcom est susceptible de causer un préjudice grave et irréversible à la concurrence » explique Margrethe Vestager, commissaire chargée de la concurrence et du numérique. « Nous avons donc ordonné à Broadcom de mettre immédiatement un terme à son comportement ».
Je vous demande de vous arrêter !
Si l’enquête sur le fond se poursuit, la Commission estime en effet que « des mesures provisoires sont justifiées pour empêcher que la concurrence ne subisse un dommage grave et irréparable sur certains marchés des systèmes sur puce pour décodeurs de télévision et modems ». Car, avec notamment l’arrivée toute récente de la norme WiFi 6, les pratiques du géant risquent d’affecter les prochains développements du marché, empêchant ses concurrents de se positionner auprès d’un certain nombre de clients liés par les accords d’exclusivité de Broadcom.
Il est donc ordonné à l’entreprise américaine de cesser dans les 30 jours, d’appliquer ses clauses « contenant des obligations d'achat exclusif ou quasi exclusif et des avantages commerciaux » et de s’abstenir de convenir de clauses similaires, ainsi que « de recourir à des pratiques punitives ou de représailles ayant un objet ou un effet équivalent ». Ces mesures provisoires courent sur les trois prochaines années ou jusqu’à ce que d’ici là un verdict soit rendu sur le fond par la Commission.