Si financièrement le temps n’est pas au beau fixe pour l’équipementier, il tente de rassurer à l’occasion de son évènement londonien, et mise sur l’intelligence artificielle, avec Mist sur la partie WLAN, pour renouer avec la croissance.
«Gamechanger», le mot d’ordre de Juniper pour sa conférence NXTWORK 2019, qui se tient aujourd’hui à Londres, semble quelque peu tape-à-l’oeil, pour ne pas dire prétentieux. Force est de constater que l’expert des réseaux n’est pas dans sa meilleure forme depuis quelques trimestres.
Au troisième trimestre de son exercice fiscal 2019, l’entreprise annonçait un chiffre d’affaires de 1,13 milliard de dollars, en recul de 4% sur un an. Sa principale activité, le routing, perdait près de 90 millions de dollars entre 2018 et 2019, et la chute est encore plus marquée dans le segment phare, les Service Providers (principalement les telcos), dont les revenus trimestriels sont passés de 545 millions de dollars au 30 septembre 2018 à 452 millions en 2019.
Sur ce point précis, Marcus Jewell, le Chief Marketing Officer et vice-président exécutif de Juniper, nous répondait hier qu’il n’était pas question pour l’équipementier de s’éloigner des telcos. Il reconnaît néanmoins que les segments Cloud et Enterprise sont ceux générant la plus forte croissance : la faute, du côté des telcos, de la 5G. En effet, selon Marcus Jewell, les opérateurs concentrent en ce moment leurs investissements sur l’achat de fréquences, bien plus que sur l’achat d’équipements. Mais la vapeur devrait s’inverser, c’est « une question de timing ». Retour à la croissance à l’horizon 2021, portée par l’edge et par les achats de matériels pour la 5G (Juniper a signé à ce propos un partenariat avec Ericsson) ?
L’IA, surfait mais sous-coté
Ce matin, lors de sa keynote, c’est sur un tout autre terrain que Rami Rahim, le CEO de Juniper, se plaçait. L’an dernier, le NXTWORK était concentré sur le multicloud : nous en avions mangé à toutes les sauces. Cette année, exit le multicloud, l’IA est la star. Mais pas l’IA qui fait le buzz, non... l’IA avec de vrais cas d’usage. Rami Rahim admet que l’IA est souvent « surcotée », il « comprend le scepticisme », mais tout de même, l’IT peut être le premier secteur à en bénéficier. Et ce à travers le cheval de bataille de Juniper, le software-defined network. « Je crois dur comme fer que le SDN peut exploiter toute la puissance de l'IA » déclare le patron de l'équipementier.
A commencer par le datacentre, avec Contrail Insights, lancé le 18 novembre dernier. Cette solution intégrée à Contrail Enterprise Multicloud s’appuie sur l’analyse des données de télémétrie pour d’une part fournir une visibilité sur le niveau de service de l’infrastructure, et de l’autre automatiser certaines opérations de dépannage et de maintenance, en prédisant par exemple les risques de congestion sur tel point du réseau. Mais c’est en vérité sur Mist que le CEO insiste. Rachetée en mars dernier par l’équipementier pour 405 millions de dollars, Mist Systems, jeune pousse fondée par d’anciens de Cisco, venait combler la très fâcheuse absence de brique wireless dans l’offre de Juniper.
Mist pour sauver les meubles ?
Mais telle n’est pas la raison principale de ce rachat, assure Rami Rahim. Non, il s’agissait bien évidemment d’intelligence artificielle, Mist Systems proposant une solution d’optimisation du réseau basée sur le machine learning. Elle avait notamment développé un bot, Marvis, destiné à simplifier les opérations de surveillance et de dépannage. Ingéré et digéré par Juniper, Mist « simplifie les déploiements et les opérations en collectant et exploitant les données, fournissant une expérience supérieure pour l’utilisateur final et simplifiant la vie de l’administrateur réseau ».
Ainsi, Marvis a été étendu pour couvrir également les réseaux fixes, avec toujours traitement du langage naturel pour répondre aux questions des utilisateurs. « Amazon a son Alexa, Tony Stark a son Jarvis, nous avons notre Marvis » plaisante Manoj Leelanivas, Chief Product Officer chez Juniper, soulignant la capacité de cet assistant à indiquer à l’administrateur ce qu’il se passe sur le réseau, au niveau des switchs par exemple, « y compris si le switch ne vient pas de Juniper ». Néanmoins, pour les opérations de résolution automatisées, la correction d’erreurs de configuration des ports par exemple, il semble que seul le matériel Juniper soit supporté.