La bataille fait rage depuis plusieurs jours. Elle oppose Apple à Epic Games, éditeur du jeu à succès Fortnite et du moteur Unreal Engine et entraîne une myriade d’autres entre, de Google à Tinder en passant par Spotify. Le casus belli : les conditions financières imposées par les boutiques applicatives, dénoncées par les éditeurs d’applications comme étant des abus des positions dominantes.
Qu’il est compliqué, sur mobile, de faire sans le Play Store ou l’Apple Store. Sur les terminaux Apple surtout, la boutique applicative de la marque à la pomme est un passage obligé. Et Cupertino le sait pertinemment, et n’hésite pas selon certains éditeurs d’abuser de cet avantage.
Spotify a ainsi engagé l’an dernier les hostilités, saisissant la Commission européenne qui a annoncé plus tôt en 2020 lancer une enquête quant à d’éventuels abus de position dominante de la part d’Apple, à qui la plateforme de streaming musical reproche des règles instaurées ces dernières années par Apple “de limiter délibérément le choix et d’étouffer l'innovation au détriment de l'expérience utilisateur”.
Taxe App Store
Le Suédois n’est pas seul dans ce combat. Les règles relatives à la distribution et à la monétisation des applications sur les boutiques applicatives fait débat depuis déjà plusieurs années. Mais cette fois, c’est un acteur de poids qui entre dans la bataille, en la personne d’Epic Games, éditeur du moteur 3D Unreal, qui domine avec Unity le marché, et du jeu Fortnite, 350 millions de joueurs au dernier décompte, qui sort l’artillerie lourde contre Apple.
Tout débute la semaine dernière, lorsque Epic met à jour ses applications Fortnite pour Android et iOS. Principale nouveauté, un bonus coûtant 10 dollars en passant par les systèmes de paiement d’Apple ou de Google, ou 8 en achetant directement auprès d’Epic. Et cela, les deux géants n’aiment vraiment pas. Mountain View comme Cupertino considèrent en effet que toute tentative de contourner le passage à la caisse lors d’une transaction réalisée dans une application téléchargée depuis leurs boutiques applicatives, transactions sur lesquelles ils prélèvent 30%, contreviennent à la politique d’utilisation des stores.
Apple inflexible
Ni une ni deux, Google et Apple supprime l’application de leurs boutiques. Mais Epic avait préparé la riposte. L’éditeur dépose deux plaintes aux États-unis à l’encontre des géants, les accusant d’abus de position dominante, et débute une campagne de communication sur les réseaux sociaux visant à écorner l’image de ses adversaires.
Si Google se fait petit, Apple joue les fier-à-bras, en révoquant l’accès d’Epic aux SDK MacOS et iOS. Ce qui implique que l’éditeur n’est plus en mesure de mettre à jour Unreal Engine sur ces plateformes, ce qui impacte également tous les développeurs tiers qui utilisent ce moteur graphique. En réaction, Epic a déposé un nouveau recours pour recouvrer son accès aux outils de développement d’Apple.
Si le bras de fer s’engage à peine, Epic compte déjà des alliés. A commencer par un autre GAFAM, Facebook, qui en profite pour attaquer Apple sur ses commissions, signalant notamment que la marque à la pomme prélève jusqu’aux dons effectués pour aider des PME frappées la crise sanitaire, alors même que le réseau social, grand prince, s’est refusé à prélever la moindre commission sur ces opérations. Spotify ou encore Tinder lui emboîtent le pas, dénonçant pour l’un les “pratiques déloyales” d’Apple, pour l’autre ses “politiques injustes portant préjudices aux consommateurs, aux développeurs et aux entreprises”. Mais pour l’heure l’entreprise de Tim Cook maintient sa position, assurant que Epic Games s’est créé “ses propres problèmes”.