La marque à la pomme n’a pas respecté l’ordonnance de l’Authority for Consumers and Markets néerlandaise. La voici contrainte de payer 5 millions d’euros par semaine, jusqu’à ce qu’Apple mette les conditions d’accès à son App Store en conformité.
Le régulateur néerlandais n’aime guère qu’on se moque de lui, et la petite plaisanterie d’Apple pourrait coûter à la marque à la pomme 50 millions d’euros. Une bagatelle pour le géant, mais le litige qui l’oppose à l’ACM pourrait faire des émules alors que, depuis plusieurs années, les conditions qu’Apple impose aux développeurs sont décriées.
Dans le cas présent, l’Authority for Consumers and Markets néerlandaise a estimé, en août 2021, que Cupertino abusait de sa position dominante dans l’écosystème iOS. L’affaire portait sur les applications de rencontre, Tinder, OkCupid, Grindr et consorts : le régulateur expliquait que ces services ne pouvaient, sur iPhones, n’être proposés que par le biais de l’App Store, créant une dépendance des éditeurs à l’égard d’Apple.
Abus de position dominante
Or Apple, profitant de cette situation, impose ses conditions aux développeurs, qui n’ont d’autres choix que de les accepter. Outre les commissions prélevées par la marque à la pomme, l’entreprise de Tim Cook contraint les éditeurs, s’ils souhaitent proposer des services payants ou des abonnements dans leurs applications, de passer par son propre système pour ces achats in-app. Avec les frais qui vont avec, et terminent dans les poches d’Apple.
« L’ACM considère ces conditions comme déraisonnables et contraires aux règles de la concurrence » expliquait l’autorité néerlandaise. Apple saisit sans surprise la justice néerlandaise. La cour de district de Rotterdam suspend une partie de la décision le 24 décembre. Toutefois, elle autorise l’ACM à ordonner au géant américain d’ajuster ses conditions d'accès à l'App Store néerlandais, de permettre aux éditeurs tiers d’applications de rencontre d'utiliser des systèmes de paiement autres que le système de paiement d'Apple dans l’App Store et d’indiquer, dans leurs applications, l’existence de ces solutions alternatives.
5 millions par semaine
« Si Apple ne règle pas les conditions déraisonnables dans les deux mois, il devra payer une astreinte périodique de 5 millions d'euros par semaine jusqu'à un maximum de 50 millions d'euros » écrivait le régulateur. Bon gré mal gré, le géant s’exécute et annonce le 14 janvier avoir procédé aux changements exigés.
« Nous craignons que ces changements ne compromettent l'expérience utilisateur et ne créent de nouvelles menaces pour la confidentialité des utilisateurs et la sécurité des données » écrit Cupertino « En attendant, nous sommes obligés d'apporter les modifications obligatoires que nous lançons aujourd'hui et nous fournirons de plus amples informations sous peu. Pour se conformer à l'ordonnance de l'ACM, nous introduisons deux nouveaux droits facultatifs exclusivement applicables aux applications de rencontres sur l'App Store néerlandais qui offrent des options de traitement de paiement supplémentaires aux utilisateurs ».
Apple se serait donc mis en conformité et tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes, fin de l’histoire… Mais l’Authority for Consumers and Markets se penche évidemment sur ces modifications. Et réalise qu’on la prend pour une poire. Hier, dans un nouveau communiqué, le régulateur annonce que « Apple n'a pas satisfait aux exigences fixées ». D’une part, l’entreprise n’a pas modifié ses conditions d’accès, ce qui rend caduques ses annonces. « Pour le moment, les fournisseurs d'applications de rencontres peuvent simplement exprimer leur "intérêt" » déplore l’ACM.
Poudre aux yeux
En outre, la marque à la pomme limite les options proposées aux éditeurs. « Par exemple, Apple semble obliger les fournisseurs d'applications à faire un choix : soit se référer à des systèmes de paiement en dehors de l'application, soit à un système de paiement alternatif ». Or, aux yeux du régulateurs, les éditeurs doivent être en mesure de choisir les deux options.
Ce constat de l’ACM a une implication immédiate : Cupertino doit payer à l’autorité néerlandaise la première astreinte de 5 millions d’euros. Et si le géant continue de se payer la tête du régulateur et n’applique pas l’ordonnance prononcée, il devra verser chaque semaine une astreinte de 5 millions d'euros dans la limite de 50 millions d'euros. De quoi donner des idées à la Commission européenne, qui enquête de son côté sur Apple et ses abus de position dominante.