Le fleuron français des réseaux IoT lance sa première formation autour des applications pratiques de l’Internet des objets. Principe : confier aux participants le développement d’une solution IoT innovante et viable commercialement en seulement trois mois. Une formation gratuite que Sigfox déclinera en Europe dès 2019.
«Une Hacking House est un lieu où nous transformons les idées en véritables solutions IoT en moins de cent jours », résume Raouti Chehih, Chief Adoption Officer chez Sigfox. L’entreprise toulousaine a recruté en juillet 2017 ce co-fondateur d’EuraTechnologies, le plus grand incubateur de start-up en Europe. Sa mission : donner un coup d’accélérateur à l’écosystème IoT (Internet of Things). Car si le réseau Sigfox couvre déjà plus de 50 pays et régions, il lui manque encore des solutions IoT pour l’exploiter à pleine capacité.
« Pour renforcer l’adoption de l’IoT, il faut développer l’offre de solutions déjà disponibles sur le marché. Certains projets IoT coûtent trop cher et prennent trop de temps car ils nécessitent de lourds développements de solutions. Ce qu’il manque, ce sont des solutions sur étagères, correspondant aux principales attentes du marché. »
C’est justement pour développer l’offre de solutions IoT, que Sigfox a imaginé son concept de Hacking House. Les participants vont pouvoir se former gratuitement aux technologies IoT, en travaillant sur des projets concrets pendant trois mois. Les entreprises partenaires et clientes de Sigfox, à la recherche de solutions IoT, co-financent l’ensemble de la formation. Mais en retour, les « apprenants » vont développer des solutions étoffant « l’écosystème IoT », ce qui bénéficiera à Sigfox, ses partenaires et ses clients.
La première Hacking House a ouvert ses portes en septembre à Fremont (Californie), dans les locaux de l’École 42 de Xavier Niel, avec laquelle Sigfox a passé un partenariat. Les apprenants séjournent sur place durant toute la formation, selon le principe du co-working – co-living. Sigfox prend ainsi en charge les frais d’hébergement.
L’informaticien, premier public des Hacking Houses
La sélection s’est effectuée sur la base d’entretiens, complétés par des tests de création hardware et de développement software. Il faut donc clairement disposer d’un background technologique, mais aussi d’un minimum de compétences dans le développement commercial d’un produit. L’objectif est bien de créer une ébauche de solution IoT qui serait viable commercialement. « L’idée est de dénicher les futurs talents de l’IoT. Cela peut être des entrepreneurs, des étudiants, des professionnels en reconversion… de tous âges, des toutes nationalités et tous horizons professionnels. Nous n’avons pas réellement de profil type. Mais les informaticiens sont les bienvenus. Ils constituent même le premier public que nous souhaitons toucher avec les Hacking Houses », poursuit Raouti Chehih.
Les profils recherchés peuvent cependant avoir une orientation plutôt : « ingénieur software », « ingénieur hardware », « manager de projet », « designer » ou même « business analyst ». « Ils vont travailler en équipe, donc nous cherchons aussi la complémentarité des talents », poursuit-on chez Sigfox. Pour la première promotion californienne, Sigfox a retenu 12 candidatures parmi plus de 200 candidats internationaux. Durant l’été 2018, l’entreprise avait organisé à Paris un camp d’été, le « Summer Hack », dont les gagnants ont obtenu leur place dans la Hacking House. « Nous visons des sessions de formation de 30 à 40 élèves, à raison de quatre promotions par an par Hacking House », précise Raouti Chehih.
Apprentissage par la pratique
Une fois dans la Hacking House, l’apprenant a dix jours pour choisir le projet qu’il va mener en petit groupe de deux ou trois personnes. Ces projets sont proposés par les équipes de Sigfox ou correspondent à des demandes réelles d’entreprises partenaires et clientes. Pour la première promotion, une dizaine de projets ont été proposés et trois retenus par les participants. Il s’agit notamment de développer une solution dédiée à la prévention des feux de forêt, problématique qui touche particulièrement la Californie. La solution doit exploiter des capteurs IoT pour déclencher une alarme prévenant les incendies avant que la situation ne soit hors de contrôle.
Autre projet : développer un système de « connected seal » (scellé connecté) pour des cartons d’emballage, afin de savoir quand un colis a été ouvert. Le troisième projet retenu tourne autour d’un système d’étagères connectées destinées à « délivrer aux retailers différentes informations d’approvisionnement des stocks », indique Sigfox. Pour mener à bien leur projet, les « apprenants » disposent de ressources techniques mises à disposition par Sigfox et ses partenaires. Il s’agit bien entendu d’un accès au réseau de communication IoT de Sigfox, mais aussi de matériel et composants pour réaliser le prototype de la solution.
Les apprenants sont encadrés durant leur travail, mais il n’y a aucun cours théorique. « C’est du pur “ learn by doing ” », souligne Raouti Chehih. Ils reçoivent les conseils d’experts de Sigfox, mais aussi de partenaires industriels comme STmicro, de spécialistes de l’IoT comme Vantiq ou encore d’accélérateurs de start-up, comme l’américain HAX. Le projet suit trois phases : le design thinking (élaboration du concept), le prototypage de la solution et le pitch de présentation auprès d’experts et partenaires Sigfox. À la fin du cursus, les apprenants reçoivent une validation de compétences. « À terme, nous souhaitons pouvoir proposer un véritable certificat de formation. Mais pour cela, nous devons devenir un centre de certification. Ce sera la deuxième étape du projet Hacking House, prévue d’ici une année ou deux », indique-t-on chez Sigfox.
Direction Taïwan, puis l’Europe
Pour l’heure, les participants ont déjà « toutes leurs chances » d’être recrutés par Sigfox ou un de ses partenaires ou clients, souligne l’entreprise toulousaine. « Ils peuvent même créer leur start-up et nous les accompagneront dans cette démarche », indique Raouti Chehih. Après la première Hacking House américaine, Sigfox compte décliner le concept à Taipei (Taïwan) à la fin 2018, puis en Europe en 2019. Des villes comme Paris, Lille, Berlin, Munich ou Londres pourraient accueillir ces lieux de formation. Et dans les trois années à venir, Sigfox espère déployer une cinquantaine de Hacking Houses dans autant de pays. « L’objectif est de former six mille personnes et de voir émerger environ deux mille projets IoT d’ici à cinq ans », conclut Raouti Chehih. ❍