Un amendement au projet de loi relatif à l’instauration d'un « état d'urgence sanitaire », présenté par deux députés, a été rejeté. Le texte prévoyait de faciliter les procédures imposées aux opérateurs dans la collecte et le traitement des données de santé et de localisation. Une possibilité déjà intégrée au code de la sécurité intérieure par la loi Renseignement en 2015.
Face à la pandémie de COVID-19, le gouvernement a fait examiner en urgence un projet de loi instaurant « l’état d’urgence sanitaire ». Si la question de l’utilisation par les autorités des données de localisation fournies par les opérateurs télécom se posent ailleurs en Europe, en Italie, en Autriche, en Allemagne ou encore en Belgique, nulle mention dans le texte original du projet de loi.
Cependant, deux parlementaires LR, Patrick Chaize et Bruno Retailleau, ont eu l’idée de soumettre un amendement introduisant dans le projet de loi une disposition selon laquelle « toute mesure visant à permettre la collecte et le traitement de données de santé et de localisation, est autorisée pendant une durée de six mois suivant la date de publication de la présente loi ». Une formulation très large, les élus expliquant que cet amendement entendait viser à faciliter les procédures imposées aux opérateurs dans la collecte et le traitement des données de santé et de localisation.
Amendement
Cet article était donc susceptible de permettre aux autorités de forcer les opérateurs à leur partager les données de localisation et de santé de leurs clients. Mais l’amendement, qualifié de « scélérat » par la Quadrature du Net, a finalement été rejeté. Qu’à cela ne tienne, explique l’association de défense des libertés numériques, puisque des dispositions similaires existent déjà. En effet la loi Renseignement, adoptée en 2015, « permet à l’État de surveiller la population pour une très large variété de finalités, notamment « pour le recueil des renseignements relatifs à la défense [des] intérêts économiques, industriels et scientifiques majeurs de la France » ».
Car si la crise sanitaire n’est pas mentionnée explicitement, la Quadrature considère que les conséquences du coronavirus, notamment du point de vue économique, peuvent justifier aux yeux de l’Etat le recours aux dispositifs techniques prévues par la loi de 2015. Tout en étant conforme au RGPD, « en théorie, les données sensibles, telles que les données de santé que révélerait une telle surveillance (par exemple le fait que, en raison de ses déplacements, une personne présente un haut risque d’avoir contracté le virus), peuvent bien être traitées « pour des motifs d’intérêt public dans le domaine de la santé publique » ».