Les acteurs des réseaux ont pris la crise sanitaire de plein fouet. Non seulement leurs finances ont subi les effets du confinement, mais les déploiements ont pris du retard, aggravant la situation. Infranum annonce que, sur les objectifs 2020, il faudra compter sur un million de prises en moins.
InfraNum tenait hier une conférence de presse afin de présenter les résultats de l’étude que l’association a mené avec les cabinets EY et Tactis. Un second point d’étape pour la fédération des industriels des réseaux, puisqu’elle a déjà conduit une enquête auprès de ses adhérents au plus fort de la crise sanitaire. Et le constat aujourd’hui est le même qu’alors : si la maintenance des équipements a pu être assurée ces trois derniers mois, le secteur a comme de nombreux autres été impacté par la pandémie et les mesures prises pour l’affronter.
Ainsi l’activité n’a jamais été totalement interrompue mais, pendant le confinement, réduite de plus de moitié sur les déploiements fixes et mobiles. Depuis le 11 mai, elle a pu reprendre à 75% de son niveau pré-crise et un retour à 90% est prévu vers septembre. Les entreprises ont ressenti les effets de ce ralentissement, amplifiés par des “freins opérationnels”, tels que les problèmes rencontrés dans l’obtention d’autorisations, l’annulation de projets ou encore les difficultés de déplacements.
Bilan, une perte de 36% de leur chiffre d’affaires pour les acteurs de la filière, qui déplorent pour 30% d’entre eux des difficultés de trésorerie. Et des surcoûts lors du confinement et encore après, imputés “aux retards de déploiement et à la mise en place des mesures barrières”. Pour autant, seule une faible minorité envisage de licencier, et ils sont encore moins nombreux ceux qui prévoient une liquidation.
Un million de prises en moins
Sur ces “retards de déploiement”, InfraNum tire le signal d’alarme. “Alors que 2020 devait être l'année de tous les records avec un prévisionnel reconstitué des opérateurs à 5,3 millions de prises déployées, celles-ci ne devraient être que 4,3 millions” fait remarquer la fédération. Et encore, sous réserve que des mesures de reprises soient mises en place rapidement. Dans son scénario, les zones RIP et AMII seront les plus durement impactées par ce “ralentissement brutal”. “Conséquence directe : plusieurs mois de retard par rapport aux objectifs de déploiements initiaux”.
“Si notre écosystème est abîmé, il n'en reste pas moins mobilisé pour se remettre d'aplomb et assurer ses engagements dans le cadre du Plan France Très Haut Débit et du New Deal Mobile, dans l'esprit initial d'une co-construction avec l'Etat et les collectivités locales” insiste Etienne Dugas, le président d’InfraNum, avant de lister l’éventail de mesures qui s’impose pour rattraper ce retard, du moins en partie. Ce pourquoi le concours de l’Etat et des collectivités s’avère nécessaire.
Plan de relance
A commencer par l’activation des “niches de gains d'efficacité non couvertes par la loi ELAN”, à savoir fluidifier les relations entre l’ensemble des parties prenantes de sorte à faciliter les raccordements et les travaux (AG de copropriété, base adresses nationale, supports aériens sur appuis communs, pose en façade, etc.). Ensuite, et dès cet été, InfraNum souhaite que soient réalisées des actions “coup de poing”, encourageant l'Etat à renforcer ses efforts sur la formation et l'emploi et à "assurer des passerelles entre les filières en difficultés et celle des infrastructures numériques, au travers des centres de formation opérationnels et des plateaux labellisés". Concertation public-privé, travail sur les connexions radio et satellitaires, reconnaissance du caractère "essentiel" de la filière ou encore transformation numérique des entreprises sont également au programme.
Enfin, sur le plan financier, la fédération appelle le gouvernement à soutenir les acteurs de la filière par le biais d'avance de phase sur les subventions de l'Etat aux collectivités (via le FSN) de l'ordre de 200 millions d'euros, de renforcement des fonds propres des entreprises via un fond de filière et du gel des pénalités de retard en lien avec la crise sanitaire. Des crédits d'impôts (et des fonds de concours) pour les TPE-PME sont en outre souhaités pour "financer le raccordement à une connexion fibre optique professionnelle et de définir des PCA-PRA (plan de continuité d'activité et plan de reprise d'activité)". Telles sont les mesures désirées par InfraNum, soumises à l'exécutif. Il faudra désormais attendre septembre, et le plan de relance qui devrait être dévoilé à l'occasion de la présentation de l'Observatoire du THD2020 pour savoir si les recommandations de la fédération sont suivies ou non.