L’affaire est grave : on ne parle ni plus ni moins, avec Pegasus, que de l’espionnage du Président de la République, de ministres, d’avocats, de journalistes français. Si grave qu’Emmanuel Macron a convoqué ce matin un conseil de défense exceptionnel pour discuter du sujet.
Ce matin au micro de Carine Bécard sur France Inter, le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, a annoncé la tenue aujourd’hui même d’un « conseil de défense exceptionnel ». Mais pas question ici de passe sanitaire, de quatrième vague ni d’amende de 45 000, euh 1500 euros pour les restaurateurs qui ne contrôleraient pas leurs clients. Non, ce conseil de défense sera dédié à Pegasus.
Le logiciel espion développé par l’entreprise israélienne NSO, et opéré par divers gouvernements plus ou moins (et souvent le second) soucieux des questions de libertés individuelles, de droits fondamentaux et de démocratie, n’en finit plus de faire écrire les journalistes… Quand bien même son objectif consistait dans certains cas à les faire taire. Et il inquiète au plus haut niveau de l’Etat. Car le Maroc, pays « ami » et client de NSO, aurait essayé d’infiltrer le téléphone du président de la République française. Et ceux de ministres, d’élus, de journalistes, d’avocats.
Un gouvernement très au fait de la cyberdéfense
« Si ce qui a été révélé par les journalistes et notamment la cellule investigation de Radio France est confirmé et avéré, c'est très grave. Un certain nombre de téléphones portables, de responsables politiques, de journalistes ont été ciblés, et cette enquête ne dit pas si ces téléphones ont été tous effectivement infectés, si des données en ont été retirées. Donc c'est ça qui est en train d'être regardé » expliquait ainsi Gabriel Attal, tout en réfutant toute accusation de légèreté en matière de cybersécurité et en insistant : « on ne découvre pas la question de la cyberdéfense et de la cybersécurité ».
« Les téléphones du Président sont changés régulièrement, il y a un certain nombre de paramètres de sécurité » poursuit-il. Emmanuel Macron suit donc, de l’aveu de son porte-parole, cette affaire « au plus près », tandis que Jean Castex a quant à lui ordonné « toute une série d’investigations ». Et que les plaintes commencent à pleuvoir et que le Maroc dément utiliser Pegasus à des fins d’espionnage et dénoncent des « accusations infondées ».
Le Maroc nie, NSO dans le déni
Pendant ce temps, du côté de Tel Aviv, NSO continue de nier tout lien entre ses programmes malveillants et la fameuse liste. D’ailleurs, l’entreprise est si lasse que ses relations presse partent en vacances. « À la lumière de la récente campagne médiatique planifiée et bien orchestrée menée par Forbidden Stories et poussée par des groupes d'intérêts spéciaux, et en raison du mépris total des faits, NSO annonce qu'il ne répondra plus aux demandes des médias sur cette question et il ne jouera pas avec la campagne vicieuse et calomnieuse » écrit NSO dans un communiqué intitulé « Enough is enough ».
Dans l’édition de ce matin, Le Canard Enchaîné révèle qu’il a porté plainte, la deuxième de son histoire. En 1973, le vaillant Palmipède attaquait la DST dont les agents tentaient de poser des micros dans les locaux du journal. Les barbouzes ont changé, les méthodes aussi, mais pas les objectifs : ici c’est Dominique Simonnot, ex journaliste du Canard, qui a fait l’objet des charmantes intentions du Maroc, sans doute en lien avec les articles de l’hebdomadaire sur Abdellatif Hammouchi, patron du contre-espionnage marocain, officier de la Légion d’Honneur et accessoirement accusé de torture.