Elles doivent servir à lutter contre les manipulations électorales et à empêcher la diffusion de fausses informations. Les deux propositions de loi «Fake news» réussissent seulement, pour le moment, à fédérer contre elles l’opposition, de droite comme de gauche. Il faudra attendre juillet pour connaître le fin mot de l’histoire.
Ne dites plus fake news mais « manipulation de l’information ». Les deux propositions de loi (organique et ordinaire) visant à lutter contre les « fausses informations », notamment en période électorale, font débat. Ne serait-ce que sur la seule définition du terme « fake news ».
Naïma Moutchou, députée LREM du Val d’Oise et rapporteure de la proposition de loi organique, a soumis un amendement en commission des lois remplaçant « fausses informations » par « la manipulation de l’information ». Une « manipulation » qu’elle définit dans un autre amendement (pour la loi ordinaire cette fois-ci) comme « toute allégation ou imputation d’un fait dépourvue d’éléments vérifiables de nature à la rendre vraisemblable ».
48 h chrono
Afin d’éviter de se faire descendre en flèche à grands coups d’accusation de « censure » et de restriction de la liberté de la presse, la majorité s’est empressée d’y ajouter la notion de mauvaise foi et celle de « diffusion massive et artificielle ». Les opérateurs de plateforme auront dès lors une obligation de transparence sur la provenance des « faits constituant des fausses informations de nature à altérer la sincérité du scrutin à venir ». Ce qui n’est en soi pas une mauvaise chose.
Mais ce sera au juge des référés d’ordonner le retrait, déréférencement ou blocage d’un contenu… en statuant dans les 48 heures après « à la demande du ministère public ou de toute personne ayant intérêt à agir ». Concrètement, le juge aura deux jours pour déterminer si une information est vraie ou fausse… Pour Basile Ader, vice-bâtonnier du barreau de Paris, interrogé sur France Info, cette mesure est « impraticable ». « Je vois mal un juge en 48 heures venir dire, de manière expresse, que cette information est fausse » ajoute-t-il, citant l’exemple du soi-disant compte aux Bahamas d’Emmanuel Macron.
Hypertrophie du CSA
Autre pomme de discorde, le rôle du CSA. Le Titre II de la loi ordinaire renforce les prérogatives du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel. Celui-ci pourra alors refuser de conventionner une chaîne si « cette interdiction est nécessaire à la sauvegarde de l’ordre public ou si, eu égard à sa nature même, la programmation de cette chaîne » est susceptible de « manipuler l’information ». Et si le média est contrôlé « ou sous l’influence » d’un État étranger, le CSA peut refuser la convention ou ordonner la suspension de sa diffusion lors d’une période électorale.
Les débats ont été électriques à l’Assemblée, l’opposition dénonçant une loi au mieux inutile, au pire attentatoire à la liberté d’informer. Certains rappellent par ailleurs que des mesures législatives existent déjà pour lutter contre « les fausses nouvelles » et ce depuis 1881. Plus de 150 amendements ont été déposés et les deux propositions de loi seront finalement mises au vote en juillet.