Obsolescence programmée : Apple condamné en France, sans débat sur le fond

Reconnue par la DGCCRF coupable de pratiques commerciales trompeuses, la marque à la pomme se voit contrainte de verser 25 millions d’euros pour ne pas avoir informé ses utilisateurs qu’elle ralentissait délibérément l'iPhone. Une somme record, mais qui nous prive d’un procès sur le fond.

Fin 2017, des utilisateurs d’iPhone 6, 6S, SE et 7 se plaignaient du ralentissement de leurs smartphones après mise à jour d’iOS 11. Rapidement, Apple sortait de son silence et reconnaissait réduire délibérément les performances de ses terminaux, afin d’en épargner les composants, batteries en tête. Et ce à l’insu du consommateur… Associations et utilisateurs ne s’y sont pas trompés et ont dénoncé une pratique susceptible de pousser à l’achat d’un nouveau smartphone, plus récent, plus performant.

Poursuivi aux Etats-Unis, en Israël et condamné en Italie, Apple a fait l’objet d’une plainte pour délit d’obsolescence programmée en France de l’association Halte à l’Obsolescence Programmée. Saisie, la DGCCRF a rendu son verdict, en apparence défavorable à Cupertino. Selon notre consœur du Parisien, le gendarme de la répression des fraudes reconnaît Apple coupable de « pratique commerciale trompeuse par omission », en ce qu’il n’informait pas les utilisateurs de la dégradation volontaire des performances de l'iPhone.

25 millions

Ainsi, Apple devra verser 25 millions d’euros et publier l’information de sa « condamnation » sur son site. Néanmoins, l’affaire se règle sans procès, dans le cadre d’une « transaction pénale ». Ce que déplore l’association HOP dans un communiqué. Quoique « première victoire historique contre des pratiques scandaleuses du prêt-à-jeter », le règlement des poursuites contre Cupertino « prive les consommateurs d’un procès public sur l’obsolescence programmée ». Surtout, ce n’est pas le délit d’obsolescence programmée qui a été retenu mais bien la pratique commerciale trompeuse, à l’instar de l’autorité italienne de la concurrence.

Or le cœur de cette affaire reposait justement sur l’interprétation que ferait la justice de la définition de l’obsolescence programmée et de la « durée de vie » d’un produit.  L’article L441-2 du code de la consommation stipule qu’il s’agit du « recours à des techniques par lesquelles le responsable de la mise sur le marché d'un produit vise à en réduire délibérément la durée de vie pour en augmenter le taux de remplacement ». Apple a reconnu ralentir l'iPhone, justement afin de prolonger la durée de vie de la batterie.

Occasion manquée

Mais pour HOP, il faut associer « la réduction de la performance d’un appareil au cours de sa durée de vie » à une réduction de la durée de vie du produit, surtout lorsque l’absence d’information, soit la pratique commerciale trompeuse par omission, induit le consommateur à racheter un iPhone, ce que revient pour Apple à « en augmenter le taux de remplacement ». La transaction pénale ne permet pas de répondre à cette problématique.

En ce qui la concerne, l’association assure que cette condamnation « ouvre la voie à des demandes en dommages et intérêts de la part des clients lésés ». Hop « se réserve ainsi le droit d’accompagner les plaignants dans leur action et les appelle à se manifester » par le biais d’un formulaire en ligne.