Emmanuel Macron entre 5G et souveraineté

Hier soir, à l’occasion de la soirée de la French Tech, le président de la République s’est exprimé devant une centaine d’invités. Son allocution, laudatrice sur la résilience du secteur du numérique, a insisté sur quelques points récurrents dans le discours politique : innovation, investissements, régulation et souveraineté.  Arborant le fameux pin’s de la French Tech, et sans cravate, le président de la République s’est exprimé hier soir dans la salle des fêtes de l’Élysée devant une centaine de dirigeants d’entreprises et de responsables administratifs. Pendant un peu moins d’une heure, Emmanuel Macron a discouru sur la France, le numérique et la crise sanitaire. Au programme, peu d’annonces nouvelles et quelques petites phrases.  Une de ces phrases a été particulièrement reprise. Evoquant la 5G, le Président a assuré que “oui, la France prendra le tournant de la 5G”. Une confirmation qui fait suite à la demande d’un groupe de parlementaires de la mise en place d’un moratoire sur le déploiement du futur réseau. Ces opposants, Emmanuel Macron va leur attribuer le qualificatif peu flatteur d’amish, du nom d’une communauté aux États-Unis qui refuse la technologie. “Je ne crois pas au modèle amish et je ne crois pas que le modèle amish permette de régler les problèmes de l’écologie contemporaine” moque-t-il. 

Un débat citoyen éclairé sur la 5G

Le président de la République se dit néanmoins conscient des inquiétudes relatives à la 5G, aussi bien en termes sanitaires avec la question des ondes que écologiques, certains craignant une augmentation significative de la consommation énergétique. “Il faut lever ces peurs liées à l’innovation en expliquant par le débat citoyen éclairé” insiste au pupitre Emmanuel Macron. Mais nous aurions tort de ne résumer l’allocution présidentielle qu’à cette pique à l’intention des détracteurs de la 5G. Sur le réseau, il a notamment annoncé que dans le cadre du New Deal, les déploiements de la 3G et de la 4G vont accélérer, Cédric O recevant de nouveaux objectifs. On attend évidemment d’en apprendre plus à ce sujet.   En outre, le président a distillé tout au long de son intervention des évocations du Covid, du fait qu’il faudra vivre avec le virus pendant les semestres voire les années à venir, mais aussi et surtout la résilience des entreprises du numérique pendant la crise. A titre d’exemple, les levées de fonds, terrain sur lequel les Français ont rattrapé leur retard, la crise sanitaire ne ralentissant pas les investissements. A cela s’ajoute le plan de relance prévu par l’Etat, avec 7 milliards d’euros pour le numérique, mais pas seulement puisque les entreprises du secteur profiteront également de l’aide apportée aux verticaux auxquels elles fournissent leurs solutions. 

La BPI ne va pas chômer

L’investissement, c’était justement le grand sujet de cette soirée. Et notamment l’investissement public. L’investissement dans la transformation des TPE PME par exemple, dont le président dit qu’elles sont moins digitalisées que nos voisins. “Un frein à leur développement et à nos performances” ajoute-il. Mais aussi dans des secteurs particulièrement stratégiques. Intelligence artificielle, quantique, cybersécurité, énumère le président, “parce qu’on sait que ce sont des domaines très capitalistiques et critiques [...] il faut un investissement public fort”.   Autre point de bascule, la régulation. Longtemps vue comme un poids, elle est selon Emmanuel Macron une force de la France. Ce qu’il faut pour réussir ? “de la stabilité réglementaire et un écosystème régulé” insiste le président, qui assure que tous les États démocratiques en viendront à un moment ou à un autre à réguler leur numérique. La France est donc en avance sur la question, avec “un écosystème de régulation efficace”. 

L’inévitable question de la souveraineté

Et qu’obtient-on en mélangeant une larme d’investissement public et un soupçon de régulation ? Beaucoup de souveraineté. Le terme est revenu à de nombreuses reprises dans le discours d’Emmanuel Macron hier soir, sous l’angle de la souveraineté européenne. “Cette sortie de crise doit nous permettre d’être plus européens” appelle-t-il de ses voeux, reconnaissant que malgré le développement du marché unique numérique, cela ne “se fera pas du jour au lendemain”.  “La vraie souveraineté se bâtit au niveau européen [...] si on veut que notre écosystème soit durable, il doit être souverain” précise le président en indiquant que plusieurs batailles restent à mener. A commencer par celle, technologique, de la 5G et du logiciel, de sorte à ne “dépendre d’aucune puissance non européenne”. Mais aussi la bataille du cloud, que nous avons aujourd’hui perdue, assène le président, et qui doit être réouverte “si on veut être souverain sur le plan européen”. De là à y voir une allusion à Gaia-X dont la structure juridique est créée au moment où nous écrivons ces lignes, il n’y a qu’un pas que nous franchissons aisément.