THD filaire partout !

Pour la maison, le point de vente ou la TPE connectés

Du gigabit Ethernet déployé à partir d’un simple tableau électrique permet, pour moins de 250 €, de desservir une douzaine de postes en TPE, dans un point de vente, ou en habitation. Parce que le WiFi est instable et embouteillé, mieux vaut lui préférer un réseau filaire pour connecter les caméras de surveillance, les alarmes, les écrans, les serveurs et les postes informatiques. Seulement voilà, une habitation comme un point de vente ont généralement trop peu de surface au sol pour sacrifier le mètre-carré nécessaire aux disgracieuses baies de brassage réseau, prévues au mieux pour des locaux techniques, au pire pour des datacenters. Qui plus est, cet équipement taillé pour les entreprises coûte cher. En réalité, des alternatives existent. L’Informaticien a testé ce mois-ci l’installation d’un réseau filaire haut débit qui dessert 12 prises Ethernet plus 8 prises coaxiales murales, brassées depuis des switches du marché, installés dans un simple tableau électrique, accroché au mur. Pour une facture globale de moins de 250 € HT, il devient ainsi possible de faire circuler les données aussi vite entre les postes ou les serveurs qu’en entreprise et même de diffuser des flux vidéo TNT comme numériques sur tous les murs. Un réseau complet qui dessert 12 prises Ethernet Gigabits, 8 prises vidéo coaxiales, avec un routeur et deux switches dans un simple tableau électrique de 11,5 cm d’épaisseur, accroché sur un mur du garage.

Le meilleur WiFi plus lent qu’un réseau filaire de base

Deux outils gratuits permettent de mesurer les performances réelles du WiFi pour les comparer au réseau filaire Ethernet, censé atteindre 1 Gbits/s. Le premier, WiFi SweetSpots, est une app pour iOS et Android qui évalue la variation du débit selon la distance à la borne. Nous avons effectué nos essais avec deux bornes WiFi. L’une qui, grâce à son WiFi 802.11ac et sa bande de fréquence en 5 GHz atteint théoriquement un débit de 866,7 Mbits/s. L’autre en WiFi 802.11n avec une bande de fréquence de 2,4 GHz et qui atteint théoriquement 144 Mbits/s. Les tests ont été effectués dans un environnement où 4 machines clientes communiquent simultanément avec ces bornes, afin d’avoir des mesures en conditions réelles. Le premier enseignement est que les débits maximaux observés – au pied de la borne – sont en deçà des chiffres officiels : 605 Mbits/s en WiFi-ac et 125 Mbits/s pour le WiFi-n. Le second est qu’à une dizaine de mètres, en passant derrière deux murs épais en béton armé, le débit a déjà chuté à 120 Mbits/s pour la première et 60 Mbits/s pour la seconde. Lorsque l’on monte d’un étage, le débit maximal a déjà été divisé par au moins 10 : le WiFi-ac ne cesse d’osciller en 60 et 25 Mbits/s, tandis que le WiFi-n tombe au mieux à 15 Mbits/s, au pire à 1,2 Mbits/s. Le coffret de communication, ici avec son couvercle, est idéalement situé à côté de la centrale de l’alarme qui se connecte directement au routeur. Mais la valeur la plus intéressante est celle du débit entre deux machines (par exemple entre un NAS et un PC ou une caméra) connectées au même réseau. C’est ce que mesure l’outil iPerf3, disponible en ligne de commande pour Windows, Mac OS et Linux ; il existe un utilitaire compatible sur iOS et Android : He.Net. Sur la machine dite « serveur », il faudra entrer : iperf -s. Sur la machine dite « cliente », il faut saisir iperf -c, suivi de l’adresse IP du serveur (depuis He.Net, il suffit de sélectionner le test iperf, puis entrer l’IP du serveur). Sur le réseau de WiFi-ac, à un endroit où le débit vers la borne est mesuré à environ 100 Mbits/s, le débit entre deux machines oscille entre 25 et 36 Mbits/s. Sur le réseau WiFi-n, au même endroit, alors que le débit vers la borne est en moyenne 60 Mbits/s, le débit entre les deux machines oscille cette fois-ci entre 2 et 8 Mbits/s. Passons à l’Ethernet. Sur le réseau réalisé pour cet article, censé fonctionner à 1 Gbits/s, le débit mesuré par iPref3 entre deux machines est de 795 Mbits/s. Et ce débit reste constant que ces machines soient proches ou diamétralement éloignées, qu’elles soient séparées ou non par un switch en plus du routeur, qu’il y ait plus ou moins de machines connectées en divers points du réseau. En pratique, cela signifie que la sauvegarde d’un PC qui mettrait une heure en Ethernet pourrait durer près de la journée en WiFi et que seul l’Ethernet garantit le fonctionnement simultané d’un serveur et d’une caméra IP haute résolution situés au même endroit.

Câblage Ethernet : le moins cher suffit

Le câblage Ethernet servant à relier les prises murales au routeur doit être choisi selon une structure, une catégorie et un blindage. La bonne structure est « monobrin ». Elle fait toute la différence avec les cordons Ethernet dont on se sert communément pour relier les PC à une prise RJ45 murale, ou que les opérateurs fournissent pour se brancher à leur box. Ces cordons-là, dits « multibrins » ont huit fils constitués d’une multitude de filaments de cuivre, afin d’être très souples. Les câbles destinés à constituer l’infrastructure du réseau ont en revanche une seule pièce de cuivre par fil, pour être excessivement solides et durer des décennies. La même règle s’applique d’ailleurs pour les fils électriques situés dans les murs et ceux destinés à relier un appareil à une prise. L’outil WiFi SweetSpots montre qu’en s’éloignant de la borne, la bande passante du WiFi-ac chute rapidement de 605 Mbits/s à 53,2 Mbits/s. La catégorie définit le débit sur une longueur de câble maximale : Cat-5e pour 1 Gbits/s sur 30 mètres, Cat-6 pour 1 Gbits/s sur 100 mètres (ainsi que 10 Gbits/s sur 30 mètres), Cat-6a pour 10 Gbits/s sur 100 mètres (40 Gbits/s sur 30 mètres) et Cat7 pour 40 Gbits/s sur 100 mètres. Dans le cadre de cet article, nous avons opté pour le plus courant et le moins cher : du Cat5e. D’une part car il n’existe pas encore de routeur Ethernet ni de serveur domestique capable de délivrer du 10 Gbits/s, d’autre part, car il est peu probable qu’une habitation ou qu’un point de vente nécessite des tronçons de plus de 30 mètres. Prenons en effet l’exemple d’une habitation de quatre niveaux de 70 m2. En imaginant qu’il faille relier une prise murale au dernier étage et un routeur diamétralement opposé au rez-de-chaussée, il faudrait donc parcourir un côté de 7 mètres, un autre de 10 mètres, puis trois étages de 3 mètres chacun, soit une distance maximale de 26 mètres. Dans ce type d’installation, il est en effet conseillé de traverser les murs plutôt que de les contourner – l’idéal étant d’encastrer les câbles dans les murs périphériques, voire de traverser en diagonale depuis le plafond. La raison n’est pas seulement de raccourcir les distances : les câbles monobrins utilisés pour constituer un tel réseau étant plus rigides que les cordons, ils se courbent difficilement pour épouser les angles. Le câble monobrin F/UTP (en haut) dispose d’une feuille d’aluminium pour protéger tous les fils. En bas, une tresse renforce le blindage d’un câble S/FTP. Le blindage, enfin, permet au signal de ne pas être perturbé par les interférences des lignes électriques. Les références sont : UTP (non blindé), F/UTP ou FTP (soit une feuille d’aluminium qui enveloppe ensemble les 8 fils tout au long du câble en Cat-5e, soit une feuille d’aluminium par paire de fils en Cat-6), et S/FTP (tresse de cuivre qui entoure toutes les paires). À noter que certains fabricants indiquent un F au lieu du S. Dans le cadre de cet article, nous avons choisi du F/UTP, amplement suffisant pour faire passer du câble Ethernet à proximité des lignes électriques d’une habitation, chacun dans des gaines dédiées et séparées d’au moins 2 cm. Un rouleau de 100 m de câble Cat-5e F/UTP monobrin se négocie sur Internet environ 40 € HT. Il faut compter le double pour du Cat-6 de même qualité. Notons que les prises RJ45, murales comme embases dans le tableau de brassage, devront être du même type que les câbles, mixer les Cat-5e et Cat-6 pouvant dégrader le signal. Là aussi, les prises Cat-5e coûteront environ deux fois moins cher. Pour les signaux TNT/câble/satellite, mieux vaut leur dédier du câble coaxial classique que de passer par du câble Grade 3TV universel beaucoup plus cher.

Câblage vidéo : du coaxial plutôt que du Grade 3TV

Précisons que les fournisseurs de coffrets de communication (encadré p. 34) s’acharnent à convaincre les utilisateurs de déployer du câble Grade 3TV. Celui-ci comprend trois paires de fils supportant un signal à 900 MHz (en théorie véhiculant du 40 Gbits/s) et une paire de fils supportant la très haute fréquence de 2 200, voire 2 500 MHz pour le signal de la télévision par TNT, câble ou satellite – contre 100 MHz pour Cat-5e, 250 MHz pour Cat-6, 500 MHz pour Cat-6a, 600 MHz pour Cat-7. Selon ces fournisseurs, le bénéfice de ces câbles serait d’avoir des prises murales RJ45 universelles, servant aussi bien pour l’antenne d’une télévision (avec un adaptateur « Balun ») ou un cordon réseau d’un équipement informatique. Après une période où ces câbles étaient affichés à des prix prohibitifs, il semble que le tarif moyen ait aujourd’hui dégringolé pour rejoindre celui du Cat-6 (environ 1 €/m). Bonne affaire en théorie, le câble Grade 3TV n’est cependant pas officiellement validé pour les usages informatiques et la question de la compatibilité des prises RJ45 Cat-6 sans dégradation sévère du signal Ethernet reste posée. Dans le cadre de cet article, nous conseillons plutôt de rester sur du Cat-5e deux fois moins cher pour le réseau Ethernet et de véhiculer le signal TNT/câble/Satellite sur du câble coaxial classique (VATC17) dont le rouleau de 50 mètres coûte environ 15 € HT et dont les prises antennes murales, très répandues, ne nécessitent aucun adaptateur. Par ailleurs, il est possible de tirer un seul câble VATC17 vers une pièce, puis de l’y décomposer en plusieurs prises via un répartiteur d’antenne type F. Nous avons pu tester la compatibilité d’une box-câble de SFR/Numericable avec ce principe.

Le panneau de brassage : un simple tableau électrique

Tous ces câbles partent des prises murales, longent les murs et convergent vers le tableau de brassage. L’idée de cet article est de ne pas utiliser les volumineuses armoires 19 pouces (au minimum 60x45 cm au sol, 50 cm en hauteur et 120 € HT), mais un simple tableau électrique nu. Trouvable en grande surface pour environ 40 € HT avec quatre rails DIN, un tel tableau s’accroche au mur et n’est profond que de 11,5 cm pour une largeur d’à peine 25 cm. Surtout, les rails DIN qui servent d’ordinaire à fixer les disjoncteurs électriques sont en fait un véritable standard avec lequel quantité d’équipements sont désormais compatibles, à commencer par des boîtiers à 10 € HT dédiées au Raspberry Pi. Les rails DIN étant standard, on trouve des supports pour fixer un Raspberry Pi dans un tableau afin de fournir des services sur le réseau (NAS, Domotique…). Ici, pour desservir 12 prises murales RJ45 et 8 coaxiales, nous avons peuplé le tableau avec la box-modem opérateur offrant 4 ports RJ45, un switch de 5 ports (4 vers les prises) à moins de 20 € HT, un second switch 8 ports (7 vers les prises) à moins de 30 € HT et d’un répartiteur antenne type F avec 7 voies (6 vers les prises coaxiales) à 5,50 € HT. Tous ces éléments sont fixés aux rails par l’intermédiaire de clips de fixation sur Rail DIN vissés dans les trous prévus d’ordinaire pour l’accrochage mural. Ces clips, à environ 1 € HT l’unité, s’achètent par exemple chez le revendeur Decelect. Concernant, les embases RJ45 femelles dans lesquelles arrivent les câbles Cat-5e, il existe un standard : le keystone. Le keystone est le facteur de forme des connecteurs à clipper sur les panneaux de connectique ; on trouve ainsi des connecteurs USB, HDMI ou encore audio à ce format. Les embases RJ45 keystone Cat-5e UTP choisies dans le cadre de cet article coûtent environ 2,50 € HT l’unité. Elles se clippent sur des supports Keystone pour Rail DIN ; le fabricant Enovation en propose par exemple des doubles à 2,40 € HT l’unité – soit 6 supports pour 12 embases RJ45. Reste à relier les embases aux connecteurs RJ45 des switches : comptez environ 1 € HT par cordon RJ45 Cat-5e FTP de 15 ou 30 cm. En plus des 12 cordons à brancher dans les embases, il en faudra 2 de plus pour relier les switches au routeur. Tous ces éléments, ainsi d’ailleurs que tous les câbles évoqués dans cet article, sont par exemple disponibles chez les revendeurs TousLesCables.com et Coffrets-reseaux.com. Il est conseillé de ne pas brancher directement sur les switches les câbles venus des prises murales. D’une part, parce qu’il est très difficile de sertir sur ces câbles monobrins des connecteurs RJ45 mâles. D’autre part, parce que ces câbles, censés durer autant que le bâtiment qu’ils équipent, n’ont pas vocation à être manipulés à chaque fois que l’on remplace un switch. Enfin, on note que l’espace entre les rails DIN et le fond du tableau est suffisant pour accueillir des embases RJ45 et ou des répartiteurs coaxiaux supplémentaires.

Et le WiFi ?

Le WiFi reste indispensable pour connecter les appareils mobiles.  Pour limiter les baisses de performances du sans-fil, la solution est d’utiliser un réseau Mesh, à savoir des bornes WiFi qui communiquent entre elles pour répéter l’accès au même réseau WiFi en divers endroits du site équipé et ainsi maintenir partout un débit optimal. Dans le cadre de cet article, nous avons testé la solution Orbi Pro de Netgear, contenant une borne routeur SRR60 à connecter en Ethernet au routeur du réseau filaire et une borne satellite SRS60 à placer à distance. Les deux bornes utilisent plusieurs canaux dédiés sur la fréquence des 5 GHz pour communiquer entre elles, sans interférer avec les canaux réservés aux utilisateurs, en 5 et 2,4 GHz. De plus cette version Pro permet de créer jusqu’à trois réseaux : l’un où l’interface d’administration est accessible (moyennant un mot de passe), un autre où elle ne l’est pas et un dernier réservé aux visiteurs avec éventuellement un code d’accès à durée limitée. Offrant en théorie un débit de 866,7 Mbits/s, la solution Orbi Pro permet de maintenir un débit de 60 à 130 Mbits/s en conditions réelles sur toute la surface de test, qui comprend quatre paliers de 70 m2 (le routeur étant situé au niveau le plus bas et le satellite au second étage). Le design du routeur ne lui permet pas de prendre place au sein du coffret de communication réalisé dans le cadre de cet article. Néanmoins, les bornes sont fournies avec des supports pour les accrocher discrètement au mur ou au plafond. Enfin, si l’on souhaite que  les appareils Wifi puissent communiquer avec les équipements du réseau Ethernet, il convient de mettre le routeur en mode point d’accès (PA),  de sorte que tous les appareils partagent la même plage d’adresses IP.

Les coffrets de communication : chers et sous-dimensionnés

Suite à l’apparition de la norme NFC15-100 qui impose le déploiement de prises RJ45 dans chaque nouvelle habitation, Legrand, Schneider et autres fabricants d’équipement électriques ont mis à leur catalogue ces dernières années des tableaux équipés d’embases RJ45 femelles et d’un répartiteur coaxial pour brasser le signal des boxes et des entrées TNT/câble vers les lignes qui courent jusqu’aux prises murales. Ces « coffrets de communication », dépourvus de switches, affichent des caractéristiques généralement sousdimensionnées pour des prix publics excessifs. Legrand propose par exemple à 140 € TTC le coffret « Full Media Coax/RJ45 » qui ne brasse que 4 prises RJ45 et 2 prises coaxiales, et à 440 € TTC le coffret « Full Media tout RJ45 » et ses 8 prises RJ45 capables de véhiculer soit du signal Ethernet, soit du signal vidéo, mais moyennant l’installation de câbles « Grade 3TV » et de prises murales « multimédias » plus chers que l’Ethernet normal. Dans les deux cas, le boîtier ne comprend même pas d’emplacement pour installer la box et un switch. Chez Schneider, le Lexcom Home VDIR390026 à 250 € HT brasse 6 prises RJ45 et 4 prises coaxiales, tandis que le VDIR390036 à 400 € HT fait exactement la même chose, mais avec un emplacement pour accrocher la box internet. Plus incompréhensible, Schneider propose toujours à son catalogue le coffret VDIR590003 qui, pour 2 100 € HT (!), intègre un modem fibre vers 8 prises RJ45 « Grade3S » capables de véhiculer en même temps les signaux vidéo et Ethernet mais uniquement en 100 Mbits/s. Dans le même ordre d’idées, Legrand propose sur sa page « Professionnels » un switch à 170 € HT adapté à ses coffrets, mais limité à 4 ports Ethernet en seulement 100 Mbits/s... quand un switch Ethernet de 8 ports 1 Gbits/s coûte environ 30 € HT  chez Netgear, D-Link et autres TP-Link.